Dieudonné : mise en scène d’une imposture
CONTRIBUTION / OPINION. Interrompu par la gendarmerie en pleine prestation dans le Pas-de-Calais le 25 juillet, Dieudonné crie une fois de plus à la censure. Mais derrière la mise en scène du persécuté se rejoue un spectacle bien rodé, où l’humour masque mal une entreprise méthodique de désinformation et de recyclage de la haine.
:max_bytes(300000)/frontpop/2025/08/SIPA_01018659_000011.jpeg)
Le 25 juillet 2025, dans le Pas-de-Calais en France, un spectacle de Dieudonné a été interrompu en pleine prestation par la gendarmerie, en vertu d’un arrêté préfectoral. Initialement prévu ailleurs puis relocalisé discrètement, le spectacle avait déjà commencé lorsqu’il a été brutalement stoppé. L’humoriste déchu, condamné à de multiples reprises pour propos antisémites et incitation à la haine raciale, s’est empressé de crier à la censure, comme un disque qui saute. Une fois encore, le même scénario se rejoue : mise en scène du persécuté, dénonciation d’un système qui l’empêcherait de parler, appel à la mobilisation d’un public qui se vit comme marginalisé.
Rappelons que Dieudonné avait nommé Jean-Marie Le Pen (celui-là même qui qualifiait les chambres à gaz de « détail de l’histoire ») parrain de sa fille. Il aurait même tenté de se pointer aux funérailles du patriarche de l’extrême droite française. Tout un symbole.
Depuis longtemps, Dieudonné est passé de l’humour à l’imposture. Derrière le masque du bouffon marginalisé se déploie une rhétorique structurée, nourrie aux techniques de manipulation discursive issues des cercles négationnistes. Il ne se contente pas de critiquer Israël ou le sionisme. Il cible régulièrement des figures publiques précises : BHL, Finkielkraut, Arthur, Bruel (toutes issues de la communauté juive) qu’il présente comme les visages d’un pouvoir occulte. Il prétend ne viser que les « sionistes », mais les noms qu’il répète, les visages qu’il affiche, ne laissent aucun doute : ce sont des Juifs, désignés à la vindicte comme responsables de tous les maux. Sous couvert d’antisionisme, c’est bien l’antisémitisme classique qui ressurgit, grimé en critique du système.
Rétroviseur
En 2008, Dieudonné invite sur scène le négationniste Robert Faurisson pour lui remettre un « prix de l’infréquentabilité et de l’insolence », sous les applaudissements d’un public conquis. L’humoriste ne s’est jamais expliqué de manière convaincante sur ce geste. Mais un simple survol...